Ces sont des évènements dignes de scènes apocalyptiques que Goma à vécu dans la matinée de lundi 06 février 2023 : des manifestations initialement organisées contre les forces de l'EAC d'une part et celles de la MONUSCO de l'autre sous prétexte de leur inaction dans la guerre qui oppose la RDC au M23, ont vite dévoilé leur vraie face : celle de nuire aux Tutsi/Banyamulenge et à leurs biens. C'est ainsi que les manifestants, ou plutôt les émeutiers ont envahi et saccagé trois églises connues pour être majoritairement fréquentées par les tutsi/Banyamulenge.
Dans une ambiance survoltée et particulièrement électrique, des foules endiablées par des discours de haine injustifiée contre les Tutsi et enragées par les criminels organisateurs, se sont rouées sur les édifices servant des lieux de culte sous des chants à tue-tête anti-tutsi. Pourtant, ces Tutsi n’ont rien à voir avec le M23, ou l'EAC et moins encore la MONUSCO. Une scène qui, comme on parle d’église, rappelle le procès de Jésus à l’occasion duquel le bienfaiteur est condamné et battu de verges en lieu et place du malfaiteur, du rebelle, ou si vous-voulez, du terroriste Barabbas.
On a pu voir des images (partagées sur les réseaux sociaux) où une dizaine de manifestants occupent le toit d'une église à l'architecture peu moderne et moins résistant qui a fini par s’effondrer sous le poids de ceux qui l'assenaient des coups de marteaux. Derrière son camera du smartphone, un des manifestants resté sur le sol pour admirer la barbarie de ses coéquipiers donne le ton: « l'église des Banyamulenge a tué les gens ». En d’autres mots, la responsabilité de tout accident lié à l’écroulement de l’édifice attaqué est à rechercher du côté des responsables de l’église détruite et non des extrémistes mobilisateurs des manifestants ! Mais ce n’est pas ce constat qui étonne.
Ce qui est davantage surprenant est la paralysie de volonté des forces de sécurité dans cette ville sous le régime d'Etat de siège, à encadrer les manifestations et à faire preuve de plus de fermeté face aux dérapages sciemment voulus et plus que redoutés. Il est clair que ces services n’ont pas été pris de court, car alertés depuis belle lurette sur l'organisation de ces sinistres manifestations. S’agissait-il donc d’une carte blanche donnée aux émeutiers ? On ne peut pas l’affirmer. Mais ce n’est pas non plus le communiqué post-manifestations de la part du Lt. Gnl. Ndima Constant, le Gouverneur Militaire qui rassure. Ce dernier fait porter la responsabilité aux « infiltrés » comme c'est si souvent le cas en pareille circonstance.
En effet, des infiltrations ont déjà été avancées lors des nombreuses manifestations précédentes et ne devraient donc pas faire l'objet de nouvelle donne ni de paramètre à oublier par le général dans son plan de sécurisation des manifestations. N’étant pas novice du contexte, il est inconcevable qu’il n’ait pas pu anticiper les dérapages et les débordements qu’il dit avoir noté seulement à la fin de la journée.
Les tutsi sont terrifiés et malgré des signaux d'alarme tirés jusqu'à en user les cordes, la violence et la persécution augmentent en intensité et en fréquence sans que les services de sécurité y adaptent la réponse. Et bien que les routes aient été barricadées des grosses pierres pour limiter les capacités d’intervention et de secours éventuels à opérer dans la ville, rien n’indique qu’une quelconque disposition sécuritaire avait été prise pour prévenir et/ ou limiter les dégâts prévisibles.
Il ne s'agit pas d’un dérapage.
Il s’agit d’un contexte explosif exacerbé par les prises de positions des acteurs de la société civile. Pour rappel, ces attaques interviennent à la suite des appels de la société civile à une mobilisation générale pour « officiellement » :
▪️Protéger la ville de Goma contre son invasion par les M23 ;
▪️Exiger la récupération des territoires occupés par le M23 ;
▪️Demander le départ des forces de l’EAC et MONUSCO si ces dernières ne s'associent pas aux FARDC pour combattre le M23.
Il ne s’agit pourtant que des faux prétextes pour cette mesquine société civile bien consciente de ce que sera le comportement des émeutiers et assaillants mobilisés. En réalité ces manifestations servent d'instrument de persécution à l'encontre des tutsi. J’en veux pour preuve le fait que comme toujours et depuis le déclanchement de cette dynamique des manifestations « contre le M23 » au Nord-Kivu, les maisons, les commerces et toute autre infrastructure portant socialement l'étiquette tutsi font régulièrement l'objet d'actes de vandalisme. L'assaut contre les églises dites des Banyamulenge/tutsi n’est donc qu’une consécration du discours de la société civile du Nord-Kivu.
Si un tel acharnement est également observé à l'égard de la MONUSCO et de la force l'EAC, c'est justement parce que les émeutiers se savent encouragés, au nom de la lutte contre le M23, à s'en prendre aux personnes et à leurs biens sans le moindre risque d'entacher leur extrait de casier judiciaire.
En effet, c’est depuis l'avènement du M23 que la ville de Goma est devenue un foyer permanent de soulèvement populaire et un terrain propice aux manifestations qui se déchaînent sur ceux qui sont cyniquement qualifiés de porter l'agenda de la balkanisation de la RDC. Cette accusation revient en boucle et le narratif qui n'est que véritable serpent de mer prend bien dans une grande partie de l'opinion et reçoit même le soutien des grandes personnalités politiques et religieuses.
Ces attaques sont en outre les résultats des prédications fanatiques à la une en RDC sur le thème du pseudo-éveil patriotique et auxquelles s'adonnent beaucoup de pasteurs et responsables d’églises. Le but est de faire des tutsi/Banyamulenge, le mal de la RDC. Et par cette nouvelle doctrine, les pasteurs dont l’estrade de l’église est décorée du drapeau national ne laissent pas passer une seule occasion sans qu’ils ne pratiquent la ségrégation et le profilage racial aussi rigoureusement dans la maison de Dieu que comme s’ils étaient dans une salle de cinéma.
Le 08/02/2023
Mukulu Le Patriote
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