
Depuis plusieurs jours, les Hauts Plateaux d'Uvira vivent des heures sombres marquées par des bombardements intensifs et des violences ciblées contre la population civile, majoritairement composée de Banyamulenge. Ces attaques, d'une rare brutalité, soulèvent de vives inquiétudes quant à leur objectif final, qui semble viser l'extermination ou le déplacement forcé de cette communauté.
Le Début des Bombardements : Gakangara Pris pour Cible
Le 19 février, aux environs de 10h00 du matin, un drone armé a survolé le village de Gakangara avant de le bombarder à deux reprises. Le nombre exact de victimes demeure encore inconnu, mais parmi les morts figure le général Rukunda Makanika Michel, figure emblématique de la communauté Banyamulenge. Ce premier assaut a plongé la population dans la stupeur et la peur, contraignant des dizaines de familles à fuir précipitamment leurs habitations.
Minembwe sous les Bombes : L'Escalade Inexpliquée de la Violence
Deux jours après, le 21 février, des drones ont été aperçus survolant le ciel de Minembwe, provoquant la panique parmi les habitants. La situation a dégénéré le 24 février 2025, vers 10h00, lorsque la localité a été prise pour cible par un avion de chasse Sukhoi et plusieurs drones. Selon des sources locales, ces appareils de guerre décolleraient du quartier général de la 3ᵉ zone de défense, dirigée par le général Pacifique Masunzu.
Ce qui choque davantage, c’est que ces bombardements se produisent en l'absence de tout affrontement ou tension avec la population locale. Les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), qui occupaient la région, s'étaient retirées depuis la prise de contrôle de Kamanyola par le M23. Cette évacuation soulève des interrogations : s'agit-il d'une stratégie délibérée visant à transformer ces zones en déserts calcinés, ou d'un simple repli face aux avancées du M23 ?
Un Enchaînement Macabre et un Silence International Alarmant
Aujourd'hui, 25 février, de nouveaux bombardements ont été signalés dans les Hauts Plateaux. Ces attaques répétées laissent penser que ce que nous dénonçons depuis des années — un génocide ciblé contre les Banyamulenge — est en train d'être exécuté sous les yeux du monde, dans l’indifférence générale.
Minembwe, loin d'être un centre stratégique ou une zone frontalière, est un village rural isolé. Pourtant, il est régulièrement pris pour cible, simplement parce que la majorité de ses habitants sont des Tutsi Banyamulenge. Malgré les alertes répétées, la communauté internationale reste inerte. Pire, elle semble concentrer ses efforts sur la lutte contre le M23, ignoré comme seul rempart protecteur de ces populations menacées.
Violences à Kamombo, Kabara et Bijombo : Une Coalition Mortifère
Pendant ce temps, à Kamombo, Kabara et Bijombo, une coalition composée des forces burundaises, des miliciens Wazalendo et des FDLR — dont la présence a été maintes fois dénoncée — a lancé des attaques dévastatrices. Ces groupes ont non seulement détruit des villages mais ont également confisqué les biens des populations : bétail, ustensiles de cuisine, literie et autres effets personnels. La population, démunie, est désormais dispersée dans la brousse, sans aucune assistance humanitaire. Cette tragédie survient en pleine saison des pluies, dans des zones où les températures peuvent chuter en dessous de zéro, présageant une catastrophe humanitaire imminente.
Dans cette débâcle, les enfants partis à l'école sont désormais séparés de leurs parents, ces derniers étant allés vaquer à leurs occupations habituelles avant que le chaos ne s’abatte sur leurs villages. La détresse est indescriptible.
Uvira : Une Ville sous Haute Tension
À Uvira, localité encore épargnée par l'arrivée du M23, l’insécurité est totale. On y recense des morts, des blessés, des pillages et des viols. Récemment, des religieux ont été pris pour cible – un acte qui, cette fois, a trouvé un écho médiatique. Mais lorsque la population civile souffre, personne ne s’en émeut. Les Banyamulenge de cette ville endurent un enfer sans fin, une réalité que les médias locaux préfèrent ignorer. Les survivants se comptent de moins en moins. Leurs habitations sont encerclées par leurs pires ennemis – les miliciens Wazalendo – qui procèdent à des exécutions ciblées.
Un Cri de Détresse Ignoré
Nous lançons un appel pathétique et urgent à la communauté internationale, aux organisations humanitaires et aux défenseurs des droits humains. Il est impératif d'agir avant qu'il ne soit trop tard. Les populations des Hauts Plateaux n’en peuvent plus d’être sacrifiées sur l’autel des intérêts géopolitiques et de l'indifférence générale. Combien de morts faudra-t-il pour que le monde ouvre enfin les yeux sur ce drame qui se joue, loin des caméras et des projecteurs ?
La vie des Banyamulenge a-t-elle moins de valeur que celle des autres peuples ? Il est temps de mettre fin à cette tragédie.
Le 25 février 2025
Paul Kabudogo Rugaba
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