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Discours de haine, responsabilité de l’État et signaux d’alerte d’un projet criminel

  • Paul KABUDOGO RUGABA
  • il y a 1 jour
  • 3 min de lecture

Dernière mise à jour : il y a 15 minutes


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Les récentes déclarations du 27 decembre 2025 a la chaine de television nationale RTC du porte-parole des FARDC, Sylvain Ekenge, constituent un tournant grave dans la banalisation du discours de haine au sein même des institutions de la République. Alors qu’il était censé s’exprimer exclusivement sur la situation militaire, il a tenu des propos ouvertement stigmatisants en évoquant une prétendue stratégie d’« Ubwenge », selon laquelle les Tutsi utiliseraient le mariage comme moyen d’infiltration démographique.

Ce discours, profondément conspirationniste, repose sur une vision racialisée de la société et reprend mot pour mot une rhétorique déjà largement diffusée par des idéologues connus tels qu’Honoré Gbanda ou Justin Bitakwira. En l’adoptant publiquement, un haut responsable militaire légitime une idéologie dangereuse qui transforme une communauté entière en ennemi intérieur.

Ces propos s’inscrivent dans un contexte particulièrement alarmant. Quelques jours auparavant, un individu nommé Jean-Claude Mubenga, résidant aux États-Unis, diffusait publiquement des messages appelant explicitement à l’extermination des Tutsi, qu’il assimilait à des « cafards » et à des « virus ». Plus grave encore, à la suite de ces appels au meurtre, il a été reçu avec les honneurs par Antoine Félix Tshisekedi et Patrick Muyaya. Des images le montrant aux côtés du président de la République ont circulé, contribuant ainsi à banaliser, voire à légitimer, un discours à caractère ouvertement génocidaire.


Dans la même logique, une ressortissante congolaise qui vit aux Etats-Unis se présentant sous le nom de Vanessa Songa (Deborah Songa), originaire du Katanga, a publiquement appelé à l’égorgement et à la décapitation des Banyamulenge, exhortant les groupes armés à ne pas « gaspiller de balles » sur eux. Ces propos, d’une violence extrême, relèvent sans ambiguïté de l’incitation directe au génocide.

Ces déclarations interviennent alors que les arrestations arbitraires se multiplient dans plusieurs régions, visant de manière disproportionnée des membres d’une même communauté. Cette concomitance ne peut être ignorée : elle suggère un climat préparatoire, conforme aux schémas bien documentés des crimes de masse, où la déshumanisation précède l’élimination physique.

Dans ce contexte, le silence — ou les prises de position tardives et ambiguës — de certaines figures morales, notamment du docteur Denis Mukwege, interpelle. Alors que celui-ci s’est érigé en défenseur des droits humains sur la scène internationale, son absence de condamnation claire face à ces discours haineux, pourtant diffusés depuis des années dans son environnement d’influence, soulève de sérieuses interrogations. D’autant plus que sa rhétorique passée autour du « double génocide » a contribué à nourrir un climat de confusion historique et de révisionnisme dangereux.

L’ensemble de ces éléments dessine un tableau préoccupant : celui d’une société où la parole de haine se normalise, où les institutions censées protéger deviennent vecteurs de stigmatisation, et où les signaux d’alerte d’un possible passage à l’acte sont de plus en plus visibles. Face à cela, le silence n’est plus une option. La responsabilité morale, politique et juridique de chacun est désormais engagée.


Annexes

 

Propos de sylvain Ekenge:

« C’est de la perfidie. Lorsque vous épousez aujourd’hui une femme tutsie, il faut faire attention, oui, il faut faire attention. Parce que, si vous êtes responsable — et c’est ce qu’ils ont fait avec les chefs coutumiers, les grands chefs coutumiers un peu partout — on vous donne une femme, mais vous allez recevoir un membre de la famille, un cousin, un neveu, qui viendra chez vous (un membre de la famille de la femme). On va vous le présenter comme un neveu ou un cousin, alors que ce n’est ni un neveu ni un cousin : c’est la personne qui viendra faire des enfants avec votre épouse à la maison. Et alors on dira que les enfants naissent tutsis, ou comme des Tutsis, parce que la race tutsie est supérieure. Voilà la perfidie. »

 

Propos de  Jean Claude Mubenga:

 « Ces gens sont des cafards, ce sont des infiltrés. Ce sont des virus. Quand il y a un virus, on cherche à le tuer. Ils sont contagieux. Quand il y a des cafards, il faut les tuer directement, sinon ils vont se multiplier et vous envahir. Dès que vous voyez un Rwandais, suivez le mouvement : s’il parle seulement le kinyarwanda, paf ! Sur place. C’est pourquoi les Wazalendo qui les rencontrent et en finissent directement avec eux. Voilà pourquoi les Wazalendo doivent être là, et beaucoup d’autres jeunes doivent les rejoindre. Si on avait extirpé ces gens-là, on serait restés entre enfants du pays. »

 

Propos de Deborah Songa, alias vanessa :

« Vous, les Rwandais, vous avez célébré la libération de la ville d’Uvira “tombée”. Pendant que les M23 se retirent de la ville d’Uvira, quittez-la avec vos frères. Et vous, les Wazalendo, ne gaspillez pas vos balles sur le corps d’un Rwandais. Non, ne perdez pas vos balles sur un Rwandais : égorgez-les, écorchez-les, décapitez-les. Nous ne voulons pas que vous gaspilliez nos balles. »

Le 29 décembre 2025

Paul Kabudogo Rugaba

 
 
 

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