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Est de la RDC : Une Guerre aux Multiples Visages et des Sanctions qui s'Intensifient

Paul KABUDOGO RUGABA

Dernière mise à jour : 10 mars


La situation en République Démocratique du Congo (RDC) et dans la région des Grands Lacs continue de se détériorer sous l'effet de tensions croissantes et de jeux d'influence géopolitique. Alors que le Rwanda fait face à une multiplication des sanctions, notamment sous l'impulsion de la France et de la Belgique, la guerre à l'Est de la RDC prend une tournure de plus en plus géopolitique.


L'Occident contre le Rwanda ?

Depuis plusieurs mois, la pression diplomatique sur Kigali ne cesse de croître. Paris et Bruxelles, historiquement influentes au sein du Conseil de sécurité des Nations unies, mobilisent leurs alliés occidentaux pour imposer des sanctions contre le Rwanda. Cette dynamique, qui s'inscrit dans un contexte de tensions régionales exacerbées, met Kigali face à un défi existentiel.

Aux frontières rwandaises, des adversaires acharnés tels que la Tanzanie et surtout le Burundi semblent vouloir raviver les antagonismes ethniques entre Tutsi et Hutu, voire entre Tutsi et Bantu, un conflit que le Rwanda avait pourtant réussi à éradiquer sur son territoire. L’Est de la RDC devient ainsi le terrain de manœuvre où se rejoue cette confrontation historique.

Une Guerre Qui Dépasse la RDC

Le conflit dans l’Est congolais, longtemps présenté comme une lutte entre les forces régulières de la RDC (FARDC) et des groupes rebelles tels que le M23 et Twirwaneho, semble désormais prendre une nouvelle dimension. Tandis que certaines communautés locales tentent de se réconcilier et de rétablir la cohabitation, le président congolais Félix Tshisekedi continue d’attiser les tensions.

Toutefois, un changement significatif se dessine au sein des FARDC. De plus en plus de soldats congolais prennent conscience de l'absurdité du conflit qui les oppose aux M23 et aux forces d’autodéfense Twirwaneho. Ils rejoignent ainsi massivement l’Alliance des Forces de Changement (AFC/M23) et les forces d'autodéfense locales, remettant en question la stratégie militaire du gouvernement congolais. Parallèlement, certains anciens leaders extrémistes de Wazalendo se repositionnent en médiateurs de paix, tandis que les forces burundaises déployées à Bibokoboko continuent de prêcher la haine contre Twirwaneho.


Un Nouveau Souffle pour la Population de l'Est ?

Alors que la presse française et belge s'attarde sur un discours alarmiste concernant l'insécurité persistante dans l'Est congolais, la population locale semble percevoir une réalité bien différente. De nombreuses villes, notamment Goma, Bukavu et Minembwe, observent une dynamique de stabilisation, voire de soulagement. Les habitants participent massivement au "Salongo", une initiative communautaire bénévole visant à nettoyer et embellir les espaces publics. Uvira s’apprête à suivre cette tendance, marquant une transformation significative de la perception du conflit.


Le Conflit : Une Guerre du Burundi contre le M23 ou de la France et la belgique contre le Rwanda ?

Face à ces mutations, l'affrontement en RDC ne semble plus être une guerre conventionnelle opposant une armée nationale à des groupes rebelles. Il s’apparente de plus en plus à une guerre par procuration où le Burundi joue un rôle clé contre le M23. Toutefois, en prenant du recul, il apparaît que ce conflit pourrait être interprété comme une opposition entre la France et le Rwanda.  

Cette situation interpelle sur le rôle de la communauté internationale, qui devrait veiller à ne pas prendre des décisions dictées par des influences partisanes. Toute prise de position déséquilibrée va à l’encontre des principes fondamentaux des Nations unies et risque d’aggraver encore davantage un conflit dont les conséquences sont déjà dévastatrices pour les populations locales.

Dans un contexte où les alliances évoluent et où les dynamiques de terrain échappent aux schémas traditionnels, il devient impératif d’adopter une approche impartiale et de privilégier un dialogue inclusif pour parvenir à une paix durable dans la région des Grands Lacs.

 Pour comprendre les raisons de l’attitude de la France et la Belgique,  faisons un tour d’histoire


5. Le rôle de la France dans le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994 

Le rôle de la France dans le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994 est un sujet de controverse et de débats intenses. De nombreux rapports et enquêtes ont mis en lumière l’implication de l’État français avant, pendant et après le génocide, bien que les responsabilités exactes fassent encore l'objet de discussions.


a) Soutien Militaire et Diplomatique au Régime Habyarimana (Avant 1994) : Dès les années 1970-1980, la France entretient des relations étroites avec le régime du président Juvénal Habyarimana, notamment via la politique de la Françafrique. Sous François Mitterrand, Paris considère le Rwanda comme un allié stratégique en Afrique francophone face à l’influence croissante de l’Anglais.

  • Formation et Armement : La France a formé et armé l’armée rwandaise (FAR) et la Garde présidentielle, qui ont joué un rôle central dans le génocide.

  • Opération Noroît (1990-1993) : Des troupes françaises sont envoyées pour soutenir le régime Habyarimana face à l'avancée du FPR, renforçant ainsi un gouvernement qui allait plus tard orchestrer le génocide.

  • Soutien politique : Malgré les signes avant-coureurs du génocide (massacres des Tutsi dès 1990, radicalisation du pouvoir, discours de haine à la Radio RTLM), la France continue de défendre Habyarimana et son régime sur la scène internationale.


b) Attentat contre Habyarimana et Déclenchement du Génocide : Le 6 avril 1994, l’avion de Juvénal Habyarimana est abattu, et sa boite noire confisquée par les français, marquent le début du génocide orchestré par les autorités rwandaises, les milices Interahamwe et les FAR. Entre avril et juillet 1994, 1 million de Tutsi sont massacrés.

  • Inaction face aux massacres : Malgré la présence d'agents français au Rwanda et les rapports alarmants sur le terrain, la France tarde à reconnaître l’ampleur du génocide et adopte une position ambiguë.

  • Soutien aux responsables du génocide : Des témoignages et rapports suggèrent que la France aurait aidé à l’évacuation de personnalités du régime génocidaire dès les premiers jours du massacre.


c) Opération Turquoise : Une Mission Controversée : En juin 1994, la France lance l’opération Turquoise sous mandat de l’ONU, officiellement pour des raisons humanitaires. Toutefois, cette intervention est critiquée pour plusieurs raisons :

  • Retard et inefficacité : Elle intervient tardivement, alors que la majorité des Tutsi ont déjà été exterminés.

  • Zone humanitaire sûre (ZHS) et protection des génocidaires : La France établit une zone dans le sud-ouest du Rwanda où de nombreux responsables du génocide trouvent refuge avant de fuir vers le Zaïre (actuelle RDC).

  • Double jeu diplomatique : L’opération semble avant tout viser à préserver l’influence française dans la région et à empêcher la victoire totale du FPR de Paul Kagame.


d) Après le Génocide : Accueil et Soutien aux Génocidaires : Après la prise du pouvoir par le FPR en juillet 1994, la France est accusée d’avoir aidé à l’exfiltration de nombreux génocidaires vers le Zaïre, où certains rejoindront les forces armées qui alimenteront les conflits régionaux en RDC.

  • Accueil de fugitifs en France : Plusieurs personnalités impliquées dans le génocide, comme Agathe Habyarimana (veuve du président) ou des militaires, ont trouvé refuge en France, parfois avec une protection implicite des autorités françaises.

  • Blocage de la justice : Pendant des années, la France a été critiquée pour son manque de coopération avec la justice rwandaise et internationale pour juger les génocidaires réfugiés sur son territoire.


e) Reconnaissance Tardive et Mea Culpa : Pendant longtemps, la France a nié toute responsabilité dans le génocide. Cependant, ces dernières années, des avancées ont eu lieu:

  • Rapport Duclert (2021) : Commandé par Emmanuel Macron, il reconnaît des « responsabilités lourdes et accablantes » de la France dans son soutien au régime Habyarimana et son inaction face au génocide, tout en écartant une complicité directe.

  • Visite d’Emmanuel Macron à Kigali (2021) : Il admet des « responsabilités » de la France, sans toutefois demander pardon explicitement.


Le rôle de la France dans le génocide des Tutsi reste une page sombre de son histoire africaine. Si des responsabilités ont été reconnues, des zones d’ombre subsistent, notamment sur l’implication exacte de certains acteurs français et la protection post-génocide accordée aux responsables. Aujourd’hui encore, ce passé pèse sur les relations franco-rwandaises et sur la perception de la France en Afrique.


5. Le rôle de la Belgique dans les conflits ethniques de la région des Grands Lacs

La Belgique, ancienne puissance coloniale au Rwanda, au Burundi et au Congo (RDC), a joué un rôle majeur dans la structuration des tensions ethniques qui ont conduit aux conflits sanglants dans la région des Grands Lacs. Son administration coloniale a profondément modifié les relations interethniques et a posé les bases des violences qui ont marqué ces pays après leur indépendance.


a) Colonisation et Construction des Identités Ethniques : Avant la colonisation, les sociétés rwandaises et burundaises étaient structurées selon des systèmes sociaux plus flexibles, où l'identité ethnique (Hutu, Tutsi, Twa) n’était pas rigide et où la mobilité sociale était possible. Cependant, la Belgique, qui prend le contrôle du Rwanda et du Burundi après la Première Guerre mondiale (mandat de la SDN en 1919), impose une politique de classification ethnique stricte et transforme ces identités en catégories politiques et administratives rigides.


a.1) Introduction des Cartes d'Identité Ethnique (1933-1935): Les Belges instaurent des cartes d’identité ethniques qui figent l’appartenance à une catégorie (Hutu, Tutsi, Twa), empêchant toute mobilité sociale et exacerbant les divisions.


a.2) Favoritisme envers les Tutsi

  • La Belgique considère les Tutsi comme une élite "naturelle", inspirée par les théories racialistes européennes de l’époque.

  • Les Tutsi sont privilégiés dans l’administration, l’éducation et l’armée, ce qui crée un ressentiment profond chez les Hutu.


a.3) Revirement en faveur des Hutu (1950s): Dans les années 1950, face à la montée des revendications indépendantistes, la Belgique change brutalement de stratégie et soutient désormais les Hutu, encourageant une prise de pouvoir par la majorité hutu, notamment à travers les massacre des Tutsi baptisés la "Révolution Hutu" de 1959 au Rwanda.


b) Le Rôle de la Belgique dans les Conflits Post-Indépendance

b.1) Le Rwanda (1959-1994) : De l’Indépendance au Génocide

  • Révolution de 1959 : Avec le soutien belge, les Hutu renversent la monarchie tutsi, entraînant la persécution et l’exil de nombreux Tutsi vers les pays voisins (Ouganda, Burundi, RDC).

  • Soutien à la République Hutu : Après l’indépendance en 1962, la Belgique continue de soutenir le régime hutu de Kayibanda, puis d’Habyarimana, malgré la marginalisation et la répression des Tutsi.

  • Passivité face aux signes avant-coureurs du génocide (1990-1994) : Malgré la montée du discours de haine et les massacres des Tutsi bien avant 1994, la Belgique reste passive.

  • Retrait des Casques bleus belges en 1994 : Après l’assassinat de 10 soldats belges au début du génocide des Tutsi, la Belgique retire ses troupes, aggravant la situation et laissant les Tutsi sans protection.


b.2) Le Burundi : Violences Cycliques et Responsabilité Belge

  • Contrairement au Rwanda, les Tutsi sont parvenus maintenir le pouvoir après l’indépendance en 1962, avec le soutien de l’armée.

  • Multiples crises ethniques (1993-2000) : L’assassinat du premier président hutu démocratiquement élu, Melchior Ndadaye, en 1993, provoque une guerre civile entre Hutu et Tutsi. La Belgique, bien qu’ayant une influence importante, ne joue qu’un rôle diplomatique limité et ne parvient pas à empêcher ces violences.


b.3) La RDC : Un Lourd Héritage Colonial: La Belgique a instauré des systèmes administratifs répressifs et exploité les divisions ethniques pour gouverner, notamment en privilégiant certaines communautés. Certaines tribus reçoivent de entité qui portent leur noms tandis que d’autres en sont privés. C’est le cas de Banyamulenge et les tutsi du Nord Kivu.  Après l’indépendance, le chaos politique et les guerres (première et deuxième guerre du Congo) trouvent aussi leur origine dans ces fractures ethniques renforcées par l’administration coloniale belge.


c.) La Belgique et les Guerres du Congo (1996-2003): Après le génocide rwandais de 1994, la Belgique adopte une posture critique envers le régime de Paul Kagame, qui intervient militairement en RDC pour traquer les génocidaires réfugiés dans les camps à l’est du pays.

  • Soutien ambigu à la RDC et critiques envers Kigali : La Belgique critique les interventions rwandaises en RDC, accusant Kigali de vouloir exploiter les ressources du pays, tout en fermant les yeux sur la présence des ex-FAR et des Interahamwe en RDC.

  • Rôle dans la diplomatie internationale : La Belgique influence certaines décisions européennes et onusiennes concernant le conflit en RDC, souvent en défaveur du Rwanda et de l’Ouganda.


L’héritage colonial belge a profondément influencé la dynamique des conflits ethniques dans la région des Grands Lacs. En institutionnalisant les divisions ethniques et en soutenant successivement différentes élites (Tutsi puis Hutu), la Belgique a semé les graines de tensions qui ont éclaté en conflits violents après les indépendances. Son rôle dans les crises post-coloniales a été marqué par des hésitations, des erreurs stratégiques et une incapacité à prévenir les génocides et les guerres. Aujourd’hui encore, son influence reste perceptible dans la politique régionale, notamment à travers ses relations avec la RDC et le Rwanda.

 

6. Le Mutisme de la Belgique face à la Tragédie des Banyamulenge

La Belgique, ancienne puissance coloniale en Afrique centrale, a longtemps joué un rôle influent dans la politique de la région des Grands Lacs. Pourtant, face aux drames répétés vécus par les Banyamulenge, une communauté tutsi du Sud-Kivu en RDC, la Belgique est restée largement silencieuse. Ce mutisme contraste avec son engagement sur d'autres questions régionales et soulève des interrogations sur la persistance de certains biais historiques et politiques dans son approche des conflits.


a) L’Héritage Colonial et la Marginalisation des Banyamulenge: Pendant la colonisation, la Belgique a structuré la société congolaise en hiérarchisant les groupes ethniques, notamment en instaurant des cartes entité ethnique et en favorisant certaines communautés aux dépens d’autres. Les Banyamulenge, bien que présents dans la région bien avant la colonisation, ont été perçus comme des « étrangers », un statut qui a nourri leur marginalisation post-coloniale.

À l’indépendance du Congo en 1960, cette marginalisation s'est accentuée, avec des discours politiques contestant leur appartenance congolaise. La Belgique, bien qu’ayant conservé une influence diplomatique en RDC après l’indépendance, n’a jamais pris position contre ces discriminations systématiques, laissant ainsi les Banyamulenge vulnérables aux persécutions.


b) L’Indifférence de la Belgique face aux Violences Contre les Banyamulenge

b.1. Les Massacres et Persécutions Répétés : Depuis les années 1990, les Banyamulenge ont été régulièrement victimes de persécutions, notamment lors :

  • Des guerres du Congo (1996-2025), où ils ont été ciblés par des groupes armés locaux sous prétexte de représenter les intérêts rwandais.

  • Des récentes offensives des groupes armés Mai-Mai et Red Tabara, soutenus par certains éléments des FARDC et des forces burundaises, qui ont conduit à la destruction de villages entiers et au déplacement forcé de milliers de Banyamulenge.


Malgré les nombreuses alertes des organisations de défense des droits de l’homme et des leaders communautaires, la Belgique n’a jamais adopté une position claire pour dénoncer ces violences.


b.2. Un Silence Diplomatique Persistant: Contrairement à son implication dans les affaires politiques du Rwanda ou du Burundi, la Belgique semble éviter toute prise de position sur la situation des Banyamulenge en RDC. Plusieurs raisons peuvent expliquer ce silence :

  • Un alignement sur la position de Kinshasa : La Belgique entretient des relations diplomatiques étroites avec le gouvernement congolais, qui lui-même a souvent nié ou minimisé les exactions contre les Banyamulenge.

  • Un héritage colonial non assumé : Reconnaître les souffrances des Banyamulenge reviendrait à admettre que la Belgique a contribué à leur marginalisation historique.

  • Une lecture biaisée du conflit : Certains cercles politiques et médiatiques belges reprennent les narratifs congolais accusant les Banyamulenge d’être des « envahisseurs » ou des « collaborateurs du Rwanda », ce qui contribue à l’inaction diplomatique.

 

c) La Contradiction avec les Valeurs Déclarées de la Belgique: La Belgique se présente souvent comme un défenseur des droits de l’homme et de la justice internationale. Elle a par exemple :

  • Joué un rôle actif dans la reconnaissance du génocide des Tutsi au Rwanda en 1994.

  • Soutenu des initiatives de justice transitionnelle dans d’autres pays africains.

Cependant, son silence sur la tragédie des Banyamulenge contredit ces engagements et révèle une approche sélective des droits humains, où certains crimes sont dénoncés tandis que d’autres sont ignorés.

 

d) Appel à une Réaction Responsable: La Belgique, en tant qu’ancienne puissance coloniale et acteur influent dans les institutions internationales, a une responsabilité morale et politique. Elle devrait :

  • Reconnaître la gravité des violences contre les Banyamulenge et condamner publiquement les exactions commises contre eux.

  • Encourager une médiation internationale pour résoudre la crise des Hauts-Plateaux de Minembwe et assurer la protection des populations menacées.

  • Mettre fin à la complaisance envers Kinshasa en conditionnant son aide au respect des droits des minorités. Donner de lumière sur l’autochtonie de banyamulenge.

  • Clarifier et reconnaître officiellement la question de l'autochtonie des Banyamulenge.


L’inaction belge face à la tragédie des Banyamulenge montre une forme d’hypocrisie diplomatique qui mérite d’être dénoncée. À l’heure où la communauté internationale prône l’égalité et la justice, la Belgique ne peut plus se permettre de détourner le regard face à ces persécutions.


7. Le Rôle de la Belgique dans le Conflit au Nord-Kivu

 Bien que la Belgique ne soit plus une puissance coloniale directe depuis l’indépendance du Congo en 1960, son influence historique, diplomatique et économique continue de peser sur la situation dans cette région.


a) L’Héritage Colonial et la Polarisation Ethnique: Sous la colonisation belge (1908-1960), les autorités ont profondément transformé la structure sociale et politique du Kivu. Plusieurs facteurs hérités de cette époque ont alimenté les tensions actuelles :

  • Une division ethnique institutionnalisée : La Belgique a, d’abord  favorisé certaines communautés (notamment les Tutsi) en leur confiant des postes administratifs et en encourageant leur migration vers le Kivu pour des raisons économiques et agricoles.

  • La politique de territorialisation : peu après, le découpage territorial sous la colonisation a marginalisé certaines communautés autochtones parmi lesquelles les tutsi de Jomba  

  • La propagation d’une idéologie anti-Tutsi : Dans les années précédant l’indépendance, les colons belges ont renforcé une vision racialiste des conflits en opposant systématiquement les Bantous aux Tutsi, une division qui se perpétue aujourd’hui dans la crise du Nord-Kivu.


b) L’Influence Belge dans les Conflits Post-Indépendance: Après l’indépendance du Congo en 1960, la Belgique est restée un acteur clé dans la politique congolaise, influençant notamment :

  • Le soutien à certaines élites congolaises : Des politiciens congolais ayant collaboré avec la Belgique durant la colonisation ont conservé des liens avec Bruxelles, ce qui a parfois favorisé des décisions excluant certaines communautés du pouvoir.

  • Le rôle ambigu dans la crise a l'est de la RDC (1996-2025) : La Belgique n’a jamais clairement condamné la marginalisation des Tutsi malgré leur rôle crucial dans la première et la deuxième guerre du Congo.


c) Un Positionnement Diplomatique Ambigu: Aujourd’hui, la Belgique adopte une posture diplomatique qui :

  • Soutient le narratif de Kinshasa : La Belgique a souvent repris les discours du gouvernement congolais accusant le Rwanda et les Tutsi du M23 d’être les responsables de l’instabilité au Nord-Kivu, sans dénoncer l’implication des FARDC et des groupes armés alliés dans les exactions contre les communautés minoritaires.

  • Évite de reconnaître certaines réalités du terrain : Bruxelles ne critique pas ouvertement le soutien de Kinshasa aux groupes armés comme les Wazalendo ou les FDLR, qui commettent des violences contre les Banyamulenge et d’autres Tutsi du Nord-Kivu.

  • Demeure influente dans les décisions de l’Union européenne : La Belgique joue un rôle clé dans les sanctions imposées contre Kigali, influençant ainsi la position occidentale vis-à-vis du conflit.


d) La Belgique et les Intérêts Économiques dans le Kivu: Le Nord-Kivu est une région riche en ressources naturelles (or, coltan, cassitérite). Bien que la Belgique ne soit plus un acteur économique majeur en RDC, certaines de ses entreprises ont historiquement bénéficié du commerce des ressources du Kivu, souvent en lien avec des milices locales.

  • Les liens entre entreprises belges et exploitants miniers : Certaines firmes belges ont été accusées d’importer des minerais en provenance du Kivu via des réseaux opaques.

  • Le rôle de la Belgique dans les régulations minières internationales : Malgré des déclarations en faveur de la transparence, Bruxelles n’a pas pris de mesures fortes contre les flux illégaux de minerais provenant des zones de conflit.


e)  Une Implication Passive mais Influente: La Belgique, en tant qu’ancienne puissance coloniale, reste un acteur clé du conflit au Nord-Kivu par son influence diplomatique, son alignement sur les intérêts de Kinshasa et son rôle indirect dans l’économie locale. Son silence sur les exactions commises par certains groupes armés et son soutien aux sanctions contre Kigali sans une analyse plus équilibrée du conflit démontrent une approche biaisée et sélective.

Si la Belgique veut réellement jouer un rôle positif dans la pacification du Nord-Kivu, elle doit :

  • Revoir sa politique diplomatique en adoptant une approche plus neutre et en condamnant toutes les exactions, y compris celles des groupes alliés à Kinshasa.

  • Soutenir un processus de dialogue inclusif entre toutes les communautés de la région.

  • Encourager des solutions économiques durables pour réduire l’impact du commerce illégal des minerais sur la prolongation du conflit.


Sans une remise en question de sa politique, la Belgique continuera d’alimenter indirectement les tensions au Nord-Kivu, prolongeant ainsi l’instabilité dans la région des Grands Lacs.

Le 09 mars 2025

Paul Kabudogo Rugaba

 
 
 

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