Sud-Kivu : la Coalition en Déroute, le Blocus s’Acharne, les Civils Paient le Prix
- Paul KABUDOGO RUGABA
- il y a 25 minutes
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Au sein de la coalition composée des forces burundaises, des FARDC et de leurs supplétifs Wazalendo, règne une cacophonie digne d’une véritable Tour de Babel. La propagande de Justin Bitakwira, longtemps utilisée comme carburant idéologique, arrive aujourd’hui à bout de souffle ; lui-même, dans un moment d’égarement ou de lucidité, en vient à agiter le spectre de la prise de Kinshasa, avouant ainsi, à demi-mot, la faiblesse criante des FARDC et leur milice Wazalendo. La population assiste désormais, incrédule, au dévoilement progressif d’une vaste manipulation : mensonges répétés, divisions savamment orchestrées, et la mise en place d’une machine à tuer baptisée « Wazalendo », une machine qui, ironie tragique, finit par dévorer ses propres créateurs.
Dans ce théâtre d’ombres, les alliés d’hier se renvoient aujourd’hui la responsabilité des échecs face à l’avancé de force révolutionnaires AFC/M23-Twirwaneho. Les condamnations fusent, les alliances se fissurent, et les tensions internes dégénèrent en affrontements armés, coûtant la vie à des combattants de la coalition comme à des civils à Sange, Uvira et ailleurs.
Parallèlement, les forces burundaises poursuivent leur acharnement méthodique contre les Banyamulenge, imposant un blocus total sur les Hauts Plateaux — un acte qui, au regard du droit international, relève du crime contre l’humanité. En voici la preuve la plus récente : hier, le 6 décembre 2025, Minembwe a encore été ensanglantée.
Sous le poids du siège imposé par les militaires burundais, les FARDC et les Wazalendo, un groupe de femmes autours de 100 individus— majoritairement Banyamulenge — accompagné de quelques hommes, a pris la route pour tenter l’impossible : franchir les lignes ennemies et aller chercher de quoi nourrir leurs enfants plutôt que de les voir mourir de faim. Après deux jours de marche à travers les crêtes glacées des Hauts Plateaux, ils ont réussi à acheter un peu de vivres : sel, savon, sucre. Un butin modeste, mais vital.
Hélas, au retour, à l’aube de ce matin-là, le convoi — environ quatre-vingts à cent personnes — est tombé dans une embuscade de la coalition FDNB/FARDC/Mai-Mai. Les Burundais venus du camp de Mikalati, renforcés par un détachement FARDC, ont attaqué de concert avec les Wazalendo et d’autres FARDC descendus de Kipupu via Kigazura.
Une unité Twirwaneho est partie de Mikenke pour porter secours à ces civils. Mais le drame était déjà consommé : les victimes, surprises et dépouillées de tout, s’étaient dispersées dans les broussailles. Pendant que les Twirwaneho repoussaient les Mai-Mai et les FARDC vers Kipupu, les militaires burundais traquaient sans relâche les femmes et les hommes cachés dans les bosquets environnants ; certains ont été exécutés, d’autres capturés et emmenés au camp. De nombreuses femmes ont été violées avec une brutalité inouïe.
Le bilan est lourd : quatre hommes ont été abattus par les balles burundaises et congolaises. Des sources concordantes évoquent quarante-cinq personnes — en grande majorité des femmes — détenues au camp de Mikalati par les FDNB et les FARDC. Seules vingt-sept personnes ont réussi à atteindre Mikenke, traumatisées, affamées, dépouillées de tout.
Fait révélateur : la coalition du mal a même requis un appui aérien. Deux hélicoptères ont ouvert le feu sur les Twirwaneho. Sur le chemin du retour, l’un d’eux, menaçant les villages de Minembwe, a été touché par les tirs Twirwaneho et s’est écrasé dans le lac Tanganyika . À son bord se trouvaient cinq mercenaires ; trois ont survécu et ont été récupérés par des unités Wazalendo et FARDC.
S’attaquer systématiquement à une communauté sur la base de son apparence ou de sa langue constitue un crime innommable, et surtout un crime imprescriptible. C’est cela, le génocide. Les images attestent la réalité : uniformes distincts, langues clairement identifiables — le swahili et le lingala du côté FARDC, le kirundi du côté burundais — et cette accusation grotesque lancée aux victimes : « On vous a attrapés avec du sel, du savon… », comme si se procurer du savon était un acte répréhensible.
L’armée burundaise aurait promis de relâcher une quarantaine de ces femmes — ces mères épuisées, violentées, encore détenues dans ses camps — mais à une condition pour le moins déroutante : qu’elles ne regagnent jamais leur foyer. Elles devraient, dit-on, être renvoyées « là d’où elles viennent », autrement dit être jetées sur les routes, dans une errance forcée, au cœur d’un environnement hostile et dangereux.
Une telle « libération » n’en porte que le nom. Elle ressemble moins à un acte humanitaire qu’à une expulsion déguisée, un bannissement qui prolonge leur supplice en les condamnant à l’itinérance et à l’insécurité permanente.
Quant à ceux qui demeurent entre les mains des FARDC et des milices Wazalendo, nul ne sait ce qu’ils sont devenus. Sont-ils encore vivants ? Sont-ils détenus, dispersés, exécutés ? Le silence est total, et seule la conscience — ou la colère — de Dieu peut encore témoigner de leur sort.
Des rumeurs persistantes évoquent désormais l’existence au Burundi d’un centre accueillant des mercenaires européens — Belges, Français — chargés de piloter avions et drones pour bombarder les villages banyamulenge. D’importants contingents venus de Tanzanie seraient en préparation pour entrer à Uvira, aux côtés des Wazalendo et des Burundais.
Pendant ce temps, les FARDC semblent s’être découvert une vocation nouvelle : celle de championnes du repli stratégique, gagnant précipitamment Baraka et Kalemie. En vérité, la réalité n’est plus voilée : c’est le Burundi qui mène désormais la guerre contre l’AFC–M23–Twirwaneho, tandis que Kinshasa observe, vacille, ou feint d’ignorer la tragédie qui s’accélère.
Sur le terrain, un constat s’impose avec une clarté presque brutale : la coalition Wazalendo–FDNB–FARDC, qui jurait il y a quelques semaines encore marcher « vers Kigali » — selon ses propres déclarations martiales — avance aujourd’hui… à reculons. Les troupes qui prétendaient mener une offensive régionale se voient contraintes d’abandonner, une à une, des localités entières : Lubarika, Katogota, Luvungi, Bwegera, Mutarure… autant de points stratégiques et de chefferies qui tombent désormais sous le contrôle des forces révolutionnaires.
Ce mouvement, pourtant présenté par les FARDC comme une « retraite stratégique », ressemble moins à une manœuvre calculée qu’à une débandade méthodique, une fuite déguisée sous les habits de la communication militaire. En réalité, cette retraite forcée offre une véritable aubaine aux forces révolutionnaires, qui récupèrent sans résistance majeure des positions clés, des axes logistiques essentiels et une légitimité croissante parmi les populations locales témoins de cet effondrement progressif.
Ainsi se dévoile un paradoxe saisissant : ceux qui annonçaient conquérir Kigali ne parviennent même plus à maintenir leur emprise sur les localités frontalières du Sud-Kivu. La « stratégie » invoquée n’est plus qu’un voile mince tendu sur une dynamique militaire défavorable, où l’initiative passe clairement du côté des forces révolutionnaires, désormais en pleine expansion.
Le 7 decembre 2025
Paul Kabudogo Rugaba




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